Atypeek Mag N°1 | Page 46

46 ATYPEEK MAG #02 JANV./FEV./MARS 2017 …transformer sa prose saxophonique en carrefour de collisions Par conséquent, cette formation ne recule pas devant la multiplica- tion des références génériques comme en témoignent le reggae de Ponk et la funk dézinguée de Circe. Expérimentateur, chercheur, Perret l’est lui-même puisque son originalité sonore provient d’une de ses trouvailles : équiper son saxophone électrique de mixers audio et de micros reliés à des loopers, à des amplificateurs de basses ainsi qu’à une série de pédales à effets. Astuce technologique lui permettant de jouer boucles rythmiques et mélodies, de les entrecroiser, de les démêler afin de transformer sa prose saxophonique en carrefour de collisions. Stridence hystérique, cahotements gutturaux, Shoebox et Kakoum reprennent ce martèlement anarchiquement mélodique au cœur duquel l’instrument crache sa réverbération plastronnante tel un primate roi tambourinant son torse altier. Les fragments en échos se heurtent aux pans naissants des cycles à venir. Les cycles se disloquent puis se reforment sur d’autres boucles vives et conquérantes. Même les ballades comme Ethiopic Vertigo, Irma’s Room, Opening et Chamo semblent étudier pour capturer l’étincelle d’écoute dans des nœuds de mailles dédoublées et les profondeurs de vertiges saturés. Alors que le combo psychédélique fait tressaillir la moindre parcelle de ferraille contenue dans leurs cordes et peaux, Guillaume Perret fait monstre du coffre colossal de son saxophone arrangé. Un soupir versé dans le bec dégage alors une texture ultra-épaisse, une densité hyper membraneuse qui embrasse le squelette de l’auditeur et agite ce lego d’os sous l’enveloppe à vif de son cuir charnel. Massacra est l’exemple même d’un heavy guitaris- tique brouillon dont le désordre impérial est décuplé, célébré et salué par les voix hurlantes du cuivre ténor. Le dernier album en date est une expérience solo de Perret. Ce qu’il laissait éclater dans ses collaborations voit le jour dans sa plus grande lueur : son aptitude à réunir une diversité d’instruments rythmiques et mélodiques en ne disposant que de son saxophone arrangé comme base de composi- tion. Ses notes repartent à l’aventure et, grâce à sa maestria, paraissent riches d’une formation musicale nombreuse alors qu’il est le seul et unique membre de son orchestre. Même s’il revient à des références plus classiques de Big Band (She’s got rhythm, Susu) et qu’il remplace la hargne de son es- 46 ATYPEEK MAG #02 JANV./FEV./MARS 2017